WUDANG SHAN
Au coeur du coeur de la Chine, dans la province du Hubei. Paysage montagneux célèbre pour son ensemble de temples à l’architecture classée au patrimoine mondial de l’humanité, également connu sous le nom de « Cité interdite du Sud ».
Un des hauts lieux du taoïsme, berceau des arts martiaux internes et du taijiquan, aujourd’hui inscrit comme patrimoine immatériel de l’humanité.
FIGURES TUTELAIRES
真武 Zhen Wu, le guerrier véritable, appelé également 玄武 Xuan Wu, le guerrier du Mystère
L’Histoire de Wudang Shan est indissociable de celle de Zhenwu, empereur et dieu tutélaire de cette montagne où il est raconté comment après avoir « raffiné son cœur » pendant 42 ans, il « se transforma en immortel obtenant ainsi la Voie » (cheng xian de dao 成仙得道).
张三丰祖师 Zhang San Feng, le Maître & Ancêtre fondateur
Zhang Sanfeng est l’Ancêtre fondateur des arts martiaux internes du Wudang et le « père » du taijiquan. Il a percé les mystères du taiji.
La légende de l’oiseau et du serpent
Selon la légende, Zhang San Feng fut inspiré par le combat entre un oiseau et un serpent. L’oiseau portait ses attaques en dessinant des cercles. Par sa souplesse et ses mouvements enroulés, le serpent les esquivait, répondait aux mouvements de l’oiseau et soudainement réagissait portant des coups imparables. Le taijiquan était né.
Le taijiquan: une même origine, différents styles
Le taijiquan a été créé par des Taoïstes qui au travers de leur pratique ont acquis la Connaissance des principes du Ciel et de la Terre combinés avec les principes de l’alchimie interne.
Zhang San Feng en est l’ancêtre fondateur. Depuis, la transmission des enseignements a donné naissance à différents courants. Aux côtés du Wudang Taiji, on trouve ainsi parmi les plus connus, les taijiquan des familles Yang, Chen ou Wu.
Ils ont chacun leurs propres caractéristiques. Par exemple, le style Chen est explosif ou le style Yang est très stable et naturel.
En tant que taijiquan ou boxe du taiji, c’est-à-dire boxe du Faite suprême, ces différents styles puisent à la même source : la pensée du taiji.
La pensée du taiji ou la transformation féconde
Le Dao engendre le Un
le Un engendre le Deux
le Deux engendre le Trois
le Trois engendre les dix mille êtres et choses
Dao De Jing
Le taijiquan du Wudang : le fil de soie 武当太极拳
Le taijiquan du Wudang est rond, fluide, spiralé, long comme un fil de soie. Il utilise la douceur pour vaincre la dureté, le calme pour gouverner le mouvement. Fidèle à la pensée taoïste selon laquelle on ne combat pas les autres, on ne voit jamais
d’explosion d’énergie.
À l’extérieur, le geste exprime un relâchement sans dispersion, une présence ferme sans tension. A l’intérieur, c’est le sentiment de l’aisance qui apparaît.
Qi et shen sont réunis tandis que yi, l’intention est tantôt comme une montagne, tantôt comme les nuages dans le ciel, tantôt comme l’eau qui coule sur terre.
Raffiner l’essence et la transmuter en qi
Raffiner le qi pour le transmuter en shen
Affiner le cœur-conscience pour retourner au vide
Raffiner le vide et s’unir au dao
炼精化炁 lian jing hua qi
炼炁化神 lian qi hua shen
炼神还虚 lian shen huan xu
炼虚合道 lian xu he dao
Cette phrase clef connue de tous les pratiquants de taijiquan du Wudang illustre le processus et l’objectif ultime de la pratique.
Pratique de santé renforçant le corps, art de défense, le taijiquan ne force rien. Il permet aux potentiels de chacun de s’exprimer et ouvre la sagesse.
On le reconnaît.
Rond, comme un fil de soie qui se déroule.
La pratique du taijiquan : indissociable de la pensée taoïste.
La pensée taoïste est à la fois vaste comme un univers qui s’ouvre à nous et précise. Elle est a la base des arts martiaux internes du Wudang. Son cœur bat dans le DaodeJing.
Chacun des aphorismes du Daodejing ouvre sur une compréhension profonde de ces lois du Ciel Terre qui portent le geste et s’expriment alors dans la qualité de la pratique.
Ainsi des fondamentaux du taoïsme qui se retrouvent tous dans la pratique du taijiquan, comme le souple qui vainc le dur (rouzhi sheng gang 柔之勝剛), la Voie qui se conforme à la Nature (dao fa ziran 道法自然), la pensée du calme et le non-agir (qing qing wuwei 清静无为) ou l’union du Ciel et de l’Homme (tian ren he yi 天人合一).
念经 Nian jing : Psalmodier les Classiques
L’étude du Daodejing ne se résume pas à une simple lecture des Classiques. C’est une répétition, une récitation, à la manière d’un mantra, qui fait son œuvre en dehors du champs de conscience. C’est ce qu’on appelle nian jing 念经.
On parle également de « comprendre le Daodejing par la pratique » (daodejing quanjie 道德经拳解), en engageant le corps et le cœur. Plus nous avançons dans la pratique du
taijiquan, plus notre corps va nous permettre de comprendre ce qui est écrit.
Plus nous nous approchons ainsi des lois de l’Univers qui ne nous sont normalement pas accessibles. Nos pensées vont se mettre en harmonie naturellement, notre corps retrouver les conditions de la santé, notre esprit s’ouvrir à plus grand.
"Comme l’eau on suit toujours la pente de moindre résistance.
Comme les différents états de l’eau, en taijiquan, on prend toutes les formes en fonction de la situation et jamais ne se blesse. 上善若水
L’homme de bien est comme l’eau DDJ, ch.8"
"C’est l’essence même du Daodejing. C’est l’objectif ultime de la pratique.
Lorsque le Ciel et la Terre trouvent en soi leur juste place, le geste devient juste, naturellement. 人和一
L’union du Ciel & de l’Homme dans l’Unité"
Lié à l’Univers
Se laisser traverser par les flux
Geste porté
Traités du taiji
Les traités du taijiquan ont permis la transmission au travers des siècles. Ils font partie intégrante de tout enseignement. Parmi les textes les plus connus, on retrouve ceux de Zhang San Feng, l’Ancêtre fondateur ou de Wang Zongyue, autre figure du taijiquan.
Certains textes portent sur la compréhension de la trame de l’Univers « le taiji (le symbole) est la mère du yin et du yang ». Ils donnent le sens profond de la pratique.
D’autres textes portent sur les techniques fondatrices comme:
« La force prend racine dans les pieds, se développe dans les jambes, est contrôlée par la taille et se manifeste dans les doigts »
ou
« L’intention d’aller vers le haut contient nécessairement en elle l’idée d’un mouvement vers le bas »
ou
« Il convient de distinguer clairement le « vide » du « plein »
Ils sont directement opératoires.
太 tai
极 ji
者 zhe
阴 yin
阳 yang
之 zhi
母 mu
也 ye
十三势 Les 13 potentiels
Les 13 potentiels sont expressément cités dans le Traité du taijiquan. Ils constituent les fondements théoriques de base à connaître et surtout à savoir mettre en pratique dans le taijiquan.
Ils sont constitués de 8 forces internes (jin 劲), dites 8 « portes » et de 5 déplacements (8+5 = 13).
Les 8 portes
Peng : parer*
Lü : tirer vers l’arrière
Ji : presser
An : appuyer
Cai : séparer par torsion
Lie : fendre, en spiralant
Zhou : donner un coup (de coude)
Kao : s’appuyer contre
Les 5 déplacements
Jin bu : avancer
Tui bu : reculer
Zuo gu : être attentif à gauche
You pan : regarder à droite
Zhong ding : tenir fermement le centre
Les 13 potentiels et les 8 trigrammes
Ciel antérieur Ciel postérieur
Ti : structure Yong : Utilisation
Dans les textes, chacun des 13 potentiels est ainsi associé à un trigramme.
Cela concerne autant la technique du taijiquan que la compréhension des lois de la transformation de l’Univers auxquelles le taijiquan donne accès.
Être enseigné.e
L’objectif dépasse l’étude des formes. L’important est ce qu’elles permettent de développer, le potentiel dont elles favorisent la matérialisation, les transformations qu’elles suscitent (peau, énergie, capacités... comme l’évoque le « retour à l’enfançon » du Dao De Jing).
Le visible et l’invisible, la matière et la non-matière.
Le calme qui influence la manière de vivre. Une progression où nous commençons par passer la porte. Puis nous avançons dans la pratique. Notre corps se structure. Nous intégrons progressivement les principes et savons comment les utiliser. Nous les connaissons dans notre propre corps. Notre shen se rassemble. Notre geste est porté par la qualité du coeur qui nous anime… jusqu’à l’indicible, niveau des immortels…
Être enseigné.e., c’est être accompagné.e sur ce chemin par un Maître.
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